Tête d’ange en pierre calcaire dur et fi sculptée en quasi ronde-bosse avec infies traces de polychromie et de dorure. Imperceptiblement inclinée vers la gauche, cette tête d’ange présente un visage allongé au front droit, aux yeux en amande fiement ourlés, au petit nez retroussé, aux lèvres aigues et au menton légèrement lourd ; il est vêtu de l’amict et d’une aube bordée de larges orfrois à décor de rinceaux feuillagés stylisés aux enroulements circulaires avec terminaisons tréfles enserrant une rosace aux pétales en virgule ; chevelure mi-longue aux boucles fortement ondulées, volumineuse à la hauteur des tempes et aplaties sur le haut du crâne. Bourges, vers 1400 H 16 cm Socle en chêne sculpté orné d’un motif de remplage gothique, XIXe siècle (léger éclat au col de l’aube)On connaît plusieurs têtes d’anges du début du XVe siècle à l’abondante chevelure bouclée comparable dans les collections muséales : celle du musée SaintRoch à Issoudun, une autre au musée de Bourges et une dernière au Bode Museum de Berlin (fi. a, b et c). Les deux premières sont données comme provenant du Palais du duc Jean de Berry à Bourges, la dernière a été vendue par la Galerie parisienne Brimo de Laroussilhe comme «Bourges, vers 1400». Le résultat de l’analyse de la pierre de la tête d’ange présentée ici est d’autant plus intéressant. Annie Blanc, géologue, propose en efft une provenance «des terrains jurassiques (bathonien) du centre de la France» pour ce «calcaire blanc très fossilifère» ; «ce calcaire fi a été exploité pour la sculpture à 45 km au sud-est de Bourges et a été utilisé dans les monuments du Berry, Bourges et alentours ainsi qu’à Souvigny». Cette analyse permet donc de rapprocher cette tête d’ange aux autres exemples connus. L’arrière gauche de la tête laissé ébauché, le raffiment particulier apporté à l’ornementation des orfrois, la singularité des traits du visage indiquent que cet ange n’était pas une fiure purement décorative mais devait tenir un rôle précis dans un groupe, à l’exemple de l’Ange Gabriel d’une Annonciation placée dans une niche ou sous un dais. Les rinceaux stylisés du col sont traités comme sur certains carreaux de pavement du XIVe siècle : courbes régulières, enroulements, flurs et feuilles aux contours simplifis à l’image d’un ensemble de carreaux provenant du château des Chaource (Aube) (fi. d). Cette tête d’ange pourrait donc être ajoutée à «la longue théorie des fiures angéliques peintes ou sculptées pour le duc» Jean de Berry qui faisait travailler sur ses nombreux chantiers à Poitiers, Bourges ou Mehun-sur-Yèvre des artistes qu’il prêtait volontiers à son frère Philippe le Hardi, duc de Bourgogne. Elle témoigne de la qualité de cette école de sculpture du centre de la France au tournant des années 1400. Ouvrages consultés : Exposition Paris, Les Fastes du Gothique – Le siècle de Charles V, Galeries Nationales du Grand palais, octobre 1981 – février 1982, pp 162 ; M. Beaulieu et V. Beyer, Dictionnaire des sculpteurs français du Moyen Age, Paris, 1992