All lots
Abbé Guillaume-Thomas-François RAYNAL et Denis DIDEROT. Histoire philosophique etpolitique Des Etablissements et du Commerce des Eur...
88

Abbé Guillaume-Thomas-François RAYNAL et Denis DIDEROT. Histoire philosophique etpolitique Des Etablissements et du Commerce des Eur...

Abbé Guillaume-Thomas-François RAYNAL et Denis DIDEROT. Histoire philosophique et politique Des Etablissements et du Commerce des Européens dans les deux Indes. Genève, Jean-Léonard Pellet, 1780. 5 volumes in-4, veau marbré, dos à 5 nerfs ornés (Reliure de l’époque). Troisième édition du plus important ouvrage de Raynal auquel Diderot collabora probablement pour un tiers. Elle est illustrée d’un portrait par Cochin, 4 planches de Moreau et 23 tableaux dépliants. Il constitue une analyse de l’influence des colonies formées par les européens depuis la découverte de l’Amérique sur la politique, le commerce et l’industrie de l’Europe ainsi que sur la civilisation en général. Raynal avait accumulé de nombreux documents qu’il livra à divers collaborateurs en leur demandant de les mettre en forme. Diderot fut l’un des principaux rédacteurs. « Sous le masque de Raynal [il] s’abandonne à toute sa fougue libertaire, contestataire et dénonciatrice. Il abomine l’intolérance, l’influence de l’église dans les affaires temporelles, n’admet qu’une morale universelle, celle qui a pour objet la conservation et le bonheur commun de l’espèce humaine… ». (Raymond Trousson).La participation de Diderot à l’ouvrage de Raynal n’a jamais fait de doute mais les passages réellement écrits par Diderot n’ont jamais été clairement défi nis et ont donné lieu à de nombreux travaux de la part de chercheurs émérites. Quérard (Les supercheries littéraires dévoilées, III-336 b) indique qu’il existerait un exemplaire de la première édition où tous les passages auraient été marqués. Cette première édition est de format in-8. Mais il cite dans le même article une note de Salverte qui parle cette fois d’un exemplaire de l’édition de 1780, in-4 il est vrai, sur lequel Diderot aurait marqué d’un trait au crayon tous les passages lui appartenant (Michèle Duchet, Diderot et l’Histoire des deux Indes ou l’écriture fragmentaire, p.22). Cet exemplaire, toujours selon Quérard, aurait été la propriété de Madame de Vandeul, fi lle de Diderot. Il semble que l’ouvrage que nous présentons soit peut-être ce fameux exemplaire ou une copie de celui-ci. En eff et, il est enrichi d’un feuillet in-4, plié en deux, formant deux feuillets in-8, entièrement manuscrit de l’époque. En tête de ces feuillets se trouve le texte suivant : “Table des morceaux qui sont de Mr. Diderot dans l’Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des européens dans les deux Indes, par l’abbé Raynal, édition de 1780, in quarto. Ces morceaux sont marqués au crayon par Mme [ ou Mr] de Vandeul”.Suit ensuite la description pour chaque tome des pages qui seraient de Diderot. Ces passages dans l’exemplaire sont marqués au crayon à papier par des traits verticaux et ces traits verticaux sont eux-mêmes délimités par de petits traits d’encre au début et in fi ne de chaque passage. Ils sont parfois de quelques lignes, parfois de plusieurs pages. Nous avons comparé la corrélation de la table avec les volumes. En tout, 346 passages sont relevés dans la table dont 71 pour le tome I, 76 pour le tome II, 79 pour le tome III et 120 pour le tome IV.La table diffère des passages marqués dans les volumes pour deux erreurs de pages (tome I, 144 pour 145 et 566 pour 567). Trois passages avec marques au crayon à papier et traits d’encre n’ont pas été mentionnés dans la table (tome II, p.265-266, tome III p.177-178 et p.508). Enfin deux passages sont marqués au crayon à papier sans traits d’encre (Tome IV, p.108-109 et p.287-288), ce qui donne 351 passages marqués au crayon dont 349 avec des traits d’encre. L’exemplaire possède par ailleurs 2 feuillets manuscrits dont nous donnons la description ci-dessous : - Tome I, p.206-207 (relié dans le volume) : Dans les 1ères éditions il est dit que pour les représentations / des hottentots, les hollandais achetèrent le pays qu’ils / voulurent occuper 90000 qu’on payat en marchandises. / Ce fait est remarquable parce que s’il est vrai le Cap serait la / seule colonie ou les européens se seraient établis (mot biffé) sans usurpation. - Tome II, p.56-57 (placé dans le volume) : p. 57, l.3 / Il n’est pas exact que les azilles furent abolis / aussitôt qu’elles ne servirent plus qu’au salut du coupable. / Les azilles ont subsisté bien longtemps après que la Grèce eut été subjuguée par les romains / Nous voyons dans Tacite livre 3 et 4 les villes / de la Grèce et de l’Asie mineure plaider / devant le Sénat sous Tibère pour conserver le droit d’azille. / Nous voyons qu’elles mettaient beaucoup d’importance à la conservation de ce droit, la superstition, un / amour propre mal entendu peut être aussi un intérêt de commerce excitaient cet intérêt. / Le Sénat détruisit le plus qu’il put de ces aziles / dont dans tous les siècles les gens sensés ont reconnu / l’absurdité, mais il laissa subsister ceux qui étaient fondés sur des titres authentiques ou sur une antiquité très / reculée. Dans tous les temps il faut que les / gouvernements ménagent les peuples, même dans / leur folie. Exemplaire provenant de la bibliothèque de Alexandre Marie, François de Paule de Dompierre, seigneur d’Hornoy, Fontaine et autres lieux, Conseiller du Roy en sa Cour de Parlement de Paris (1743-1828). François de Paule de Dompierre, seigneur d’Hornoy, était un petit-neveu de Voltaire par sa mère Elisabeth Mignot qui était la nièce directe du philosophe. C’est grâce à ce dernier qui lui avait laissé une forte somme d’argent que François de Paule de Dompierre put faire bâtir par l’architecte Huvé un château à Hornoy dont le volume porte l’ex-libris. Ce château est resté dans la famille depuis l’époque de sa construction. Le seigneur d’Hornoy fut également proche de Diderot. Ce dernier eut notamment recours à lui pour lui demander conseil dans une misérable affaire de troubles de voisinage dans laquelle le philosophe prit le parti d’un épicier, Claude Antoine de Bout, qui louait le magasin du rez-de-chaussée de l’immeuble dans lequel il habitait. Une altercation avait eu lieu entre cet épicier et le sieur Dumesnil, habitant de l’immeuble, dont la femme, voulant garer son carrosse dans la cour, avait fait déplacer les tonneaux de l’épicier dans la rue (cf. Georges Dulac, in The Voltaire foundation… 1988). Selon le feuillet manuscrit joint, les marques au crayon auraient été faites par la fille de Diderot, Madame de Vandeul, qui fut fort active avec son mari pour la mémoire de son père. Herbert Dieckmann, dans l’inventaire du fonds Vandeul qu’il dressa (Genève, Droz, 1951), mentionne l’existence hypothétique d’un exemplaire de l’édition in-4 qui aurait été annoté et dont on aurait perdu la trace. On ne saurait mettre en doute ni l’authenticité, ni la provenance de cet exemplaire. L’examen du papier manuscrit ne fait aucun doute. Il est bien de la seconde moitié du XVIIIe siècle et porte un filigrane au nom de B. Malmenede. Il existe plusieurs Malmenede ou Malmenaide qui furent fabricants de papier au XVIIIe siècle dans la région de Thiers. Il s’agit probablement de celui qui exerça son métier de 1777 à 1788, dont les deux initiales sont séparées par un quatrefeuille et sont plus hautes que les autres caractères (Raymond Gaudriault. Filigranes… en France au XVIIe et XVIIIe siècles, p. 239). Nous avons comparé les écritures des feuillets manuscrits avec celle couvrant des manuscrits juridiques de la bibliothèque du château d’Hornoy et avons constaté la similitude entre les deux feuillets d’ajouts et ces manuscrits juridiques. Si ces derniers sont de la main du seigneur d’Hornoy, ce que nous pensons, alors les deux feuillets manuscrits le sont également. En revanche, l’écriture couvrant le feuillet indiquant que les passages marqués au crayon sont de la main de Madame de Vandeul est plus difficile à déterminer. Sans pouvoir l’affirmer, il semble cependant, à la comparaison, que l’écriture est la même. D’autre part nous avons consulté le catalogue manuscrit de la bibliothèque d’Hornoy qui a été dressé en 1800 et avons trouvé trace d’un exemplaire de l’édition in-4 de l’ouvrage de Raynal. Cet exemplaire est mentionné comme devant se trouver à Paris, sans doute dans une demeure du seigneur d’Hornoy, mais il a fort bien pu réintégrer le château quelques années plus tard. Enfin, nous avons montré l’exemplaire à Monsieur Gianluigi Goggi, professeur à l’Université de Pise, qui travaille depuis plusieurs années à faire le point sur la collaboration de Diderot à l’ouvrage de Raynal et qui fait partie du comité d’édition qui dirige la réimpression de l’ouvrage de Raynal actuellement en cours entreprise par le Centre international d’étude du XVIIIe siècle de Ferney-Voltaire. Monsieur Goggi que nous remercions ici, nous a confirmé l’intérêt de cet exemplaire, notamment à cause des traits d’encre marquant le début et la fin de chaque morceau de Diderot, et nous a ainsi fait part de ses impressions : “Je constate que les données que l’on peut tirer de cet exemplaire marqué recoupent ce qu’attestent les documents du fond Vandeul, conservés à la BNF ; mais il y a aussi des discordances qu’il faudrait éclairer et expliquer. Il s’agit certainement d’un travail long et compliqué qu’on ne pourra faire sans consulter longuement l’exemplaire marqué“ Nous profitons de cette occasion pour remercier également Monsieur Dulac, Directeur de recherche honoraire à l’Institut de Recherche sur la Renaissance, l’Age classique et les Lumières, pour l’intérêt et les conseils dont il nous a fait part.Ainsi, compte tenu de tous ces éléments, de l’authenticité des pièces, de la proximité de Diderot avec Hornoy, du fait que l’exemplaire n’a pas changé de main ni de lieu depuis la fi n du XVIIIe siècle, de la corrélation entre les passages marqués et les travaux des historiens les plus érudits,…, il apparaît clair que, si l’on ne peut affi rmer qu’il s’agit bien du fameux exemplaire mentionné par les éminents bibliographes que nous avons cités plus haut, il est plus que probable qu’il est une copie de celui-ci et il nous semble évident que cet exemplaire est précieux parce qu’il est une contribution fondamentale à l’histoire littéraire française en ce qu’il nous renseigne de manière précise sur l’apport de Diderot à l’ouvrage de Raynal. Très bel exemplaire malgré un début de fente en haut d’une charnière et un accroc dans le fond de plusieurs feuillets du tome IV.

Estimate
10 000 / 15 000 €
Result (Buyer’s fees and taxes included)
14 539 €