À l'occasion de la vente Design du 15 juillet 2020 à Bruxelles, la maison Piasa célèbre Pierre Jeanneret (1896 - 1967), cousin du Corbusier, et présente une sélection de pièces rares de l'architecte et designer suisse.
Pierre Jeanneret naît le 22 mars 1896 à Genève, en Suisse. Son cousin germain, de 12 ans son aîné, n'est autre que Charles-Édouard Jeanneret dit Le Corbusier. Jeune homme, Pierre se forme à l'école des beaux-arts de Genève où il obtient le premier prix d'architecture, de sculpture et de peinture. En 1921, l'apprenti architecte s'installe à Paris et intègre d'abord l'atelier d'Auguste Perret.
Seulement un an plus tard, Pierre Jeanneret se rapproche du Corbusier, dont la réputation commence à s'établir dans la capitale. Les deux hommes installent leur bureau d'architecture rue de Sèvres et entament une collaboration fructueuse. Le Corbusier écrit : "Je me suis associé à mon cousin Pierre. Avec loyauté, optimisme, initiative et persévérance et aussi avec bonne humeur, nous nous sommes mis au travail. Deux hommes qui se comprennent sont plus forts que cinq autres qui sont seuls." Auprès de son cousin et ami qu'il admire, Pierre affirme son identité artistique et précise sa vision de l'architecture. Il refuse toute compromission avec le conservatisme d'avant-guerre et aspire à une approche nouvelle de la création architecturale. Ainsi, Le Corbusier et Pierre écrivent ensemble leur manifeste, Cinq points de l'architecture moderne. Ils formulent les caractéristiques du bâtiment moderne par excellence : pilotis, toit-terrasse, plan libre, fenêtre en bandeau et plan libre. Dès lors, ces cinq éléments se retrouvent dans les nombreuses constructions des deux architectes, dont la célèbre Villa Savoye achevée en 1931.
Pierre Jeanneret est indispensable au Corbusier. D'une part, il lui apporte la contradiction sur certains projets et incite son génie à se dépasser. D'autre part, Pierre Jeanneret est le chef de l'atelier et, à ce titre, cultive particulièrement le goût du travail manuel et plastique des matériaux bruts. À cet égard, c'est l'architecte Charlotte Perriand qui a la formule la plus juste : "Le Corbusier c'était l'homme de communication, le philosophe aussi. Pierre Jeanneret, c'était l'ombre, l'homme technique. Mais c'était une osmose, ils étaient nécessaires l'un à l'autre."
En 1951, le Premier ministre indien Nehru invite le Corbusier à construire ex nihilo la nouvelle capitale du Pendjab, Chandigarh. Bien qu'ils ne travaillent plus ensemble dans le même atelier depuis le début de la Seconde Guerre Mondiale, Le Corbusier fait appel à Pierre pour réaliser ce projet monumental. Ce dernier devient alors urbaniste officiel de l'État indien du Pendjab et se charge personnellement du mobilier. Le travail de Pierre Jeanneret à Chandigarh témoigne de l'acmé de sa collaboration avec Le Corbusier mais aussi du soucis de toujours concilier avec harmonie l'architecture moderne à la réalité du paysage indien. Ainsi, à l'image de notre paire de fauteuil en teck et cannage (lot 185), Pierre fiance les matériaux exotiques qu'il découvre en Inde aux formes épurées caractéristiques du style Corbusier.
Pierre Jeanneret (1896-1967)
Easy armchairs
Teck et cannage, 1955-1956
Estimation : 25000 / 35000 €
L'architecte demeure quinze ans en Inde pour superviser le programme pharaonique de Chandigarh, avant de s'éteindre peu de temps après son retour à Genève, en 1967.
Pierre Jeanneret (1896-1967)
Advocate chair
Teck et peau, 1955-1956
Estimation : 35000 / 45000 €
La paire de fauteuil Advocate Chair en teck et en peau, créée entre 1955 et 1956 pour la Haute Cour du Pendjab est remarquable. Elle s'inscrit dans la production de l'architecte lors de la construction de Chandigarh. Les lignes géométriques rigides des fauteuils sont atténuées par l'utilisation des matériaux naturels et exotiques. Le coloris noir accentue quant à lui l'élégance de la pièce, estimée entre 35 000 et 45 000 euros.
Pierre Jeanneret (1896-1967) et Eulie Chowdhury (1923-1995)
Library chairs
Teck et cannage, 1959-1960
Estimation : 35000 / 45000 €
Pierre Jeanneret collabora également avec l'architecte indienne Eulie Chowdhury sur plusieurs pièces de mobiliers. Cette association témoigne de l'affection qu'il éprouvait pour le pays et la population indienne. En effet, Pierre dirigeait l'école d'architecture de Chandigarh et avait à coeur de transmettre aux étudiants la conception et l'expérience de son travail. La série de quatre chaises en teck et cannage, dont l'estimation est établie entre 35 000 et 45 000 euros, fut réalisée pour la bibliothèque de l'université de Chandigarh.