La maison PIASA organise le mercredi 19 mai une vente d’art contemporain africain.
Pour la première fois à Paris, cette vente présentera le travail de deux artistes Afro-Américains majeurs : Beauford Delaney, grand peintre américain de l’après-guerre, et Kehinde Wiley, figure montante de la peinture outre-atlantique ayant entre autres, réalisé le portrait du président américain Barack Obama.
Au-delà de la présence de ces deux artistes, il s’agit d’intégrer des artistes du Nord au Sud et d’Est en Ouest, de l’École de Dakar à l’atelier du Hangar, dans un aperçu de près d’un siècle de création africaine, tout en décloisonnant l’art africain en mettant le continent plus en dialogue avec ses diasporas et diverses autres scènes lui étant liées. Cette vision d’une Afrique plurielle, ouverte sur le monde, cosmopolite, souligne la volonté d’ouverture annoncée par les deux directrices lors de leur nomination à la tête du département en janvier dernier. Quelques lots à retenir parmi les œuvres présentées :
Kehinde Wiley (né en 1977, Etats-Unis)
Ivelaw I (From the world stage: China), 2007
Estimations : 100 000 / 150 000 €
Ce tableau, de la série The world stage : China de Kehinde Wiley est un des premiers exemples d’un projet qui conduira le célèbre artiste américain à Dakar et Lagos, en Jamaïque, en Israël, en France, en Inde et au Sri Lanka.... Parallèlement à la création d’un de ses studios satellites à Pékin, où il passe plusieurs mois par an depuis 2006, Wiley, qui parle couramment le mandarin, se confronte par ce travail entamé la même année à l’histoire de la propagande politique sous la révolution culturelle chinoise. Américain, de père nigérian, revisitant les icônes eurocentriques de l’histoire de l’art à partir de plusieurs studios à Pékin, New York et Dakar : Kehinde Wiley l’artiste, tout comme son œuvre, est un pont entre plusieurs mondes et nous invite à remettre en question des notions préconçues d’identité, de classe et de genre.
Beauford Delaney (1901-1979, Etats-Unis)
Pikoula Vassiliki, 1970
Estimations : 150 000 / 200 000 €
C’est une fraîche soirée d’hiver à Paris, mais la Galerie Darthea Speyer fait salle comble. L’ambiance est feutrée, l’atmosphère chaleureuse, et la galeriste, en boa de plumes et parure de tête dans le style des années vingt, fait le tour des convives en présentant l’artiste à l’honneur à divers admirateurs. Le grand musicien de jazz Ornette Coleman est présent, en grand manteau de fourrure et veste en brocard, posant devant un tableau, conversant avec l’artiste. Face à lui, Beauford Delaney, l’oeil alerte et le sourire quelque peu timide, se prête au jeu. Il a déjà plus de 70 ans, et une certaine mélancolie habite son regard. Cela fait vingt ans que Beauford, né en 1901 à Knoxville dans le Tennessee, est arrivé à Paris, quittant New York et son Greenwich Village, où il est déjà un artiste reconnu, et où il rencontre quelques années plus tôt un jeune James Baldwin, pour accomplir à 52 ans son rêve parisien.
James Barnor (né en 1929, Ghana)
Miss Sophia Salomon, Accra, vers 1972
Estimations: 15 000 / 20 000 €
« James Baldwin dira ceci de son ami (...) : ‘Beauford Delaney m’a appris la lumière. Celle que contient chaque chose, chaque surface, chaque visage.’ Lorsque Baldwin écrit cet hommage en 1964, les deux hommes vivent chacun en France depuis plus dix ans, même s’ils se fréquentent dès les années 1940, lorsque Baldwin visite pour la première fois à Greenwich Village, celui qui deviendra son mentor. Leur amitié sera l’une des plus importantes jamais vécues à cette période entre un artiste et un écrivain. »
Autre figure importante de la photographie du continent, Paul Kodjo se démarque de ses pairs Malick Sidibé à Bamako, Philippe Koudjina à Niamey ou Jean Depara à Kinshasa par ses romans-photos, dont nous présentons ici trois photographies, dont deux inédites. Force de composition et maîtrise de la lumière donnent aux photographies de Paul Kodjo une ambiance singulière de film noir à la Hitchcock.
MWANGI HUTTER
Ce sont deux artistes plus jeunes, mais aux parcours tout aussi prestigieux, qui font eux aussi leur entrée aux enchères : Mwangi Hutter, elle d’origine kenyane, lui d’origine allemande, ont été de toutes les Biennales (Venise, Dakar, La Havane), exposés au Brooklyn Museum et au Smithsonian, et bien d’autres. PIASA présente ici pour la première fois, deux œuvres de ce duo d’artistes.
ÉGYPTE / SOUDAN
Les artistes modernes ne sont pas en reste, avec une belle sélection d’œuvres de la vallée du Nil, du Soudan à l’Egypte, menée par un bronze important du maître de la sculpture égyptienne Mahmoud Mouktar.
CONGO
Enfin, le Congo, scène importante du continent, est présent avec les grands favoris du marché que sont l’Ecole du Hangar, et bien sûr les peintres populaires tels que Chéri Samba et Moké. Le Congo, que l’on pense déjà connaître, a encore de quoi surprendre même les amateurs: une nature morte dans le style des modernes de l’Ecole de Paris, présentée dans l’exposition iconique Beauté Congo qui s’est tenue en 2015 à la Fondation Cartier, côtoiera dans la vacation du 19 Mai, deux oeuvres inédites de Tsham, datant de la période où l’artiste achève ses études à l’Académie des Beaux Arts de Kinshasa.
Pilipili Mulongoy (1914-2007, Congo)
Sans titre, vers 1950
Estimations : 10 000 / 12 000 €